L’industrie luxembourgeoise des fonds alternatifs a su, au fil des années, bâtir un modèle compétitif et efficient basé sur son excellence et sur un cadre réglementaire  favorisant la protection des investisseurs. Le Fonds d’Investissement Spécialisé (SIF) est l’exemple le plus probant de la volonté du pays de rester une place de choix pour les fonds alternatifs. Simple, flexible et réglementé, le véhicule séduit les gestionnaires européens, avec 3413 compartiments enregistrés en 2014 contre 1861 QIF , son concurrent irlandais. La plus forte croissance enregistrée dans le secteur alternatif luxembourgeois ces dernières années vient des fonds private equity et immobilier. Dans le secteur des hedge funds, le Grand-Duché s’est une fois de plus illustré en enregistrant la plus forte croissance mondiale en termes de domiciliation de fonds depuis la crise financière avec un bond de 1.3% en 2008 à 14% en 2014. Luxembourg rassemble aujourd’hui plus de la moitié des hedge funds européens et les structures caymanaises, bien que majoritaires dans cette industrie, ont connu une croissance plus modérée ces dernières années.
C’est sur ce vent d’optimisme que Fanny Sergent, associée et Hedge Funds Leader chez PwC Luxembourg, a ouvert la 6ème édition de l’Alternative Investments Conference, organisée ce mercredi 28 janvier 2015 à la Chambre de Commerce de Luxembourg en présence de 150 professionnels.

Trouver le bon équilibre entre innovation et industrialisation

L’innovation est aujourd’hui la planche de salut de tous les secteurs. L’alternatif s’y prête-t-il pour autant ? A l’heure digitale, de nouveaux défis se posent et pour rester dans la course, les gestionnaires doivent aujourd’hui faire preuve d’innovation, non seulement au niveau des produits et des opérations, mais surtout sur l’ensemble de la chaine de valeur avant que d’autres acteurs étrangers au monde de la finance ne perturbent l’activité de l’industrie toute entière.

« Seuls 30% des institutions financières citent la recherche, le développement et l’innovation comme l’une de leurs priorités, ajoute Fanny Sergent. L’innovation viendra-t-elle d’acteurs de l’industrie ?»

Selon Mark Tluszcz, co-fondateur et CEO de Mangrove Capital Partners, la révolution se passe sur la toile. Avec 3 milliards d’utilisateurs en 25 ans, internet offre des opportunités que l’industrie ne soupçonne pas encore, à l’image d’autres secteurs qui ont connus une transformation radicale en peu de temps, tels les télécoms ou le transport de personnes.
Vient alors la question de la règlementation. Est-il possible d’innover dans un secteur fortement réglementé ?  D’autres secteurs ont été dépassés par des innovations qui ont fondamentalement modifiées les usages et pour lesquels les gouvernements ont dû faire évoluer les règlementations.

Certaines initiatives ont déjà vu le jour comme des clubs de prêts aux particuliers, se substituant ainsi aux réseaux bancaires traditionnels. Le secteur financier est bel et bien amené à changer d’ici les 15 prochaines années. Cette industrie connait des marges substantielles à différents niveaux que des entrepreneurs veulent s’attribuer.
A l’heure actuelle, l’industrie répond à la nécessité d’innovation essentiellement au niveau des produits. Face au besoin de liquidité, créer des fonds de dette constitue une réponse.

« Les projets en fonds de dette fleurissent un peu partout. Le besoin est réel et les fonds alternatifs apportent une liquidité importante aux marchés financiers, » explique Mike Delano, associé chez PwC Luxembourg.

Pour Mike Greenstein, associé et Global Alternative Investments Assurance Leader chez PwC US, il s’agit de trouver le bon équilibre entre industrialisation et innovation.

L’alternatif à l’horizon 2020

L’alternatif a le vent poupe. Mais tiendra-t-il ses promesses ? Jusqu’à présent réactive en appliquant la myriade de réglementations, l’industrie occupera une place centrale dans la gestion d’actifs dans les cinq prochaines années.

« La gestion alternative devrait enregistrer une croissance annuelle de près de 9,3% au cours des prochaines années, pour atteindre 13 000 milliards de dollars en 2020, » affirme Mike Delano.

Les investisseurs, en majorité institutionnels, recherche la diversification de leurs actifs. Leur allocation oscille surtout entre les trois grandes poches : hedge funds, private equity et immobilier. Les investisseurs ne se contentent plus de regarder la performance, mais demande une décorrelation par rapport au marché, de la transparence, de la liquidité et des solutions sur mesure. En sélectionnant leurs investissements, ils se focalisent sur des gérants ayant une taille critique, une marque établie et une expertise.

Reste à l’industrie à tirer parti des nouvelles opportunités présentées par le Big Data, comme outil d’aide à la décision et à opérer un réalignement structurel. Il lui faut également investir dans les technologies et les infrastructures appropriées afin de gérer la complexité des nombreuses règles fiscales, notamment le nouvel environnement imposé par BEPS  ou encore des initiatives telles que l’imposition de la présence fiscale  comme c’est déjà le cas dans certains états américains.