EY : Une coopération internationale accrue en matière d’application de la lutte contre la corruption augmente l’enjeu pour les sociétés et leurs dirigeants
Selon la 14ème édition de l’étude réalisée par EY à l’échelle mondiale en 2016 et intitulée Corporate misconduct – individual consequences, la demande d’une transparence accrue se précise à l’échelle mondiale à l’heure de l’aggravation des tensions géopolitiques et de la volatilité des marchés financiers
Les menaces toujours plus importantes que sont la cybercriminalité, le financement du terrorisme et plus récemment encore les révélations relatives à la mauvaise utilisation à grande échelle des juridictions offshore, ont ajouté davantage de pression sur les gouvernements, les contraignant à agir et sur les entreprises, afin qu’elles identifient et limitent les problèmes de fraude et de corruption.
Cette étude, conduite auprès de presque 3.000 cadres expérimentés issus de 62 pays et territoires, souligne le soutien exprimé très largement par les entreprises en faveur d’une transparence accrue en matière de fraude, de corruption et d’appropriation, 91% des cadres reconnaissant l’importance de l’identification du bénéficiaire effectif ultime des entités avec lesquelles ils conduisent des affaires. Comme il y a deux ans déjà, le Luxembourg est repris cette année dans l’étude, 50 entreprises de tailles diverses ayant accepté d’être interviewées à ce sujet. Représentant les 9 principaux secteurs économiques, ces entreprises ont permis à l’étude de refléter une image assez représentative de l’économie luxembourgeoise.
Gérard Zolt, à la tête du département Fraud Investigation & Dispute Services (FIDS) chez EY, commente : « L’attention soutenue portée aux mesures visant à la lutter contre la corruption envers les tiers et les récentes révélations sur le potentiel mauvais usage des structures financières offshore montrent le choix fondé des dirigeants d’entreprises quand il s’agit d’acquérir une connaissance plus approfondie de leurs clients, associés, et fournisseurs. Une transparence accrue suscite incontestablement un intérêt public au sens large ».
Une transparence accrue n’est cependant qu’une des facettes de la solution à un problème ne montrant pas de signe d’affaiblissement. Au total, 39% des sondés évaluent les pratiques de corruption comme étant largement répandues dans leur pays, en faible évolution en comparaison des 38% les évoquant en 2014 et en 2012. A une question ajoutée dans l’étude réalisée cette année, 32% des sondés ont indiqué rencontrer personnellement des problèmes de corruption sur leur lieu de travail. Il est intéressant de noter que 10% seulement des sondés au Luxembourg ont répondu être confrontés à un problème de corruption largement répandu dans les entreprises locales, ce qui doit être mis en perspective avec l’économie luxembourgeoise, très orientée vers l’exportation et l’international.
Les efforts concertés des régulateurs afin d’éradiquer la corruption
Les régulateurs reconnaissent la menace posée par la corruption pour un système financier déjà en crise et apprécient la coopération internationale toujours plus importante en matière de poursuite d’individus pour actes illégaux. Les sondés se prononcent majoritairement en faveur de ces efforts dans l’application des lois, 83% d’entre eux étant d’accord avec l’effet positif de la poursuite d’individus dans la lutte contre toute future tentative de fraude ou de corruption, ils étaient 78% à partager cet avis au Luxembourg.
Néanmoins, 42% des sondés concèdent pouvoir justifier des comportements contraires à l’éthique afin d’atteindre des objectifs financiers. 16% des membres du personnel d’un département financier sous la responsabilité d’un directeur financier sont prêts à justifier un paiement en nature dans le cadre de l’attribution ou de la poursuite de contrats. Ces cadres responsables de l’éthique et de la conformité semblent être confrontés à un problème majeur s’ils sont amenés à prémunir leur organisation d’un examen approfondi du parquet.
L’étude a également identifié la perception suivante : dans les pays émergents, les individus ayant recours à la corruption ne sont pas attendus rendre compte de leurs actes. 70% des sondés au Brésil et 56% en Afrique et en Europe de l’Est pensent qu’en dépit de la volonté de poursuite de tels actes affichée par les gouvernements, elle ne se traduit pas nécessairement par des condamnations effectives.
Gérard Zolt poursuit : « l’augmentation du niveau de coopération internationale entre les agences responsables de la mise en application des lois rendent la tâche plus difficile aux fraudeurs et corrupteurs quand il s’agit d’échapper aux condamnations. Les entreprises continuent cependant à être exposées aux risques majeurs qu’entraînent les actions illégales posées par une infime minorité d’employés, en témoigne l’avis des sondés relatif à de telles inconduites, ne montrant aucun signe d’affaiblissement. La solution passe certainement par une meilleure utilisation de la technologie. Davantage encore pourrait être réalisé en matière de gestion du risque par l’analyse de données d’investigation, ce qui permettrait également d’améliorer la conformité ainsi que le résultat des enquêtes.
Bon nombre de signaux positifs sont à trouver dans les marchés où les gouvernements et les régulateurs ont entrepris des démarches destinées à lutter contre l’illégalité, par exemple en Inde. En effet, les démarches entreprises dans ce pays par le gouvernement en vue d’une transparence accrue sont saluées par les sondés, qui ne sont plus que 58% cette année contre 67% en 2014 à penser que la corruption soit largement répandue dans leur pays. En Chine, 74% des sondés locaux croient en l’application effective des lois, traduisant l’apparente efficacité de l’engagement montré par le gouvernement chinois quand il s’agit de s’attaquer à la corruption. Au Luxembourg, 38% des sondés croient en la volonté du gouvernement de poursuivre les contrevenants mais les condamnations demeurent insuffisantes.
Une bonne conformité augure-t-elle d’une croissance solide ?
La conquête de nouveaux marchés est indispensable à la plupart des entreprises, même si elle va de pair avec de nouveaux risques, souvent inconnus. L’étude démontre, à l’échelle mondiale, l’incapacité souvent constatée des entreprises à prendre les mesures appropriées destinées à y faire face ainsi qu’à réduire leur exposition au risque :
- Une entreprise sur cinq n’identifie pas les tiers comme faisant partie de leur processus de due diligence quand il s’agit de lutter contre la corruption
- Une entreprise sur trois n’évalue pas les risques de corruption liés au pays ou à l’industrie avant d’y réaliser des investissements
- La moitié des entreprises seulement a recours à des techniques telles que l’analyse de données d’investigation afin d’identifier et de diminuer les risques.
L’innovation est indispensable pour faire face aux nouveaux risques
Les lanceurs d’alerte demeurent une source d’information essentielle sur les cas de fautes présumées. Selon l’étude réalisée cette année, 55% des entreprises ont mis en place des lignes dédiées aux lanceurs d’alerte. Les régulateurs accueillent favorablement cette suggestion et dans certaines juridictions, y compris aux Etats-Unis, les lanceurs d’alerte se voient offrir de substantielles récompenses financières. Néanmoins, ces mécanismes ne font pas toujours leurs preuves. Les sondés évoquent les barrières à l’utilisation de tels mécanismes : 18% citent la loyauté envers les collègues comme un élément les empêchant de dénoncer un incident en matière de fraude et de corruption et 19% invoquent la loyauté envers leur entreprise comme un élément dissuasif. Au Luxembourg, les pourcentages pour chacun des points précédents s’élèvent respectivement à 4% et à 10%.
Gérard Zolt conclut : « Nous constatons clairement que certains employés, pour des motifs très divers, sont prêts à faire un mauvais usage (ou d’en faire bénéficier d’autres, extérieurs à l’entreprise) des données confidentielles de leur entreprise. L’équilibre entre la confidentialité des données et la sécurité crée d’autres complications. Le traitement de ces menaces liées à la cybercriminalité et à celles venant de l’intérieur même de l’entreprise devrait être une priorité essentielle de la direction et des conseils d’administration. Toutefois, 59% des directeurs financiers perçoivent toujours la cybercriminalité comme un risque faible, cette perspective induisant des défis majeurs. Il est cependant intéressant de noter que 62% des sondés basés au Luxembourg identifient la cybercriminalité comme un risque élevé, ce qui est très nettement au-dessus de la moyenne »…
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